Ressources pour arrêter de prendre les choses personnellement

Si vous avez lu les accords toltèques de Don Miguel Ruiz, vous aurez reconnu ici le 2ème de ces accords : « N’en faites pas une affaire personnelle« . Bon, je sais pas vous, mais moi je trouve ça plus facile à dire qu’à faire… J’ai réuni ici tout ce qui m’aide à arrêter de prendre les choses personnellement.

Ce que dit le 2ème accord toltèque

Ce deuxième accord m’invite à me souvenir que chacun·e d’entre nous vit dans sa propre réalité, dans son monde. Dans le monde individuel, je perçois les choses selon mon expérience, mon histoire, mes croyances, mes blessures, etc.

J’ai entendu récemment dans une conférence « Communication NonViolente (CNV) et neurosciences » par les chercheurs Yves Rossetti et Alexandre Foncelle que la perception « objective » n’existe pas : les capteurs perceptifs sont ajustés au cours de la perception en fonction de nos interprétations et de nos histoires passées.

Bref, tout ça pour dire que quand quelqu’un vous dit un truc, même s’il·elle semble parler de vous, en vrai ça ne parle de d’elle·lui, car vos faits et gestes sont passés dans sa moulinette personnelle. Essentiellement chacun·e parle de soi, et il n’y a donc aucune raison de s’énerver face à un reproche ou une critique.

Stimulus / Cause : ce n’est pas la même chose…

En Communication NonViolente on différencie ainsi le stimulus (les actions ou paroles qui font réagir l’autre, le déclencheur externe et visible) de la cause réelle de sa réaction (ses besoins ou aspirations). On peut expliquer cela simplement en remarquant que selon les gens et selon les jours, des actions identiques ne causent pas la même réaction chez les autres.

Par exemple, face au stimulus d’un bébé qui pleure, les réactions peuvent être innombrables selon les gens et les besoins : agacement si besoin de paix et de calme, attendrissement si compassion pour ce bébé, tristesse si besoin de deuil d’une histoire passée, etc. Toute la gamme des émotions est possible selon le besoin qui est touché face à ce stimulus. Le stimulus est donc un déclencheur, qui vient activer la cause profonde (essentiellement un besoin nourri ou pas nourri).

Laisser à l’autre la responsabilité de ses besoins

Vu de loin, cet accord est donc hyper simple : je suis un stimulus, ok (je peux choisir de modifier mes actes si je le souhaite), et la cause profonde est chez l’autre et là je n’y peux rien. Je n’ai donc qu’une partie de la responsabilité : celle de mes actes. L’autre a sa responsabilité dans sa réaction, ce sont ses besoins.

Conclusion : « N’en faites pas une affaire personnelle ». Chacun·e parle de soi et de ses besoins, ça n’a pas grand chose à voir avec moi et je n’ai pas de raison de m’agiter (à part l’ajustement de mes actions si je le souhaite —sans en faire une affaire personnelle…).

Le piège : il y a tout de même un bout qui me concerne

Là où je trouve qu’il y a un piège dans cet accord, c’est que ça me semble vraiment la porte ouverte à « je me coupe de mes ressentis car ça n’a rien à voir avec moi ». Autrement dit, le risque si j’applique cet accord sans avoir vraiment bossé sur moi c’est simplement de me couper de ma réaction.

Ok, j’applique l’accord, je ne réagis plus. Mais par contre, l’agitation elle est toujours là quelque part. Même si moi je ne la sens plus, mon corps l’encaisse et la stocke pour moi, avec parfois des dégâts sur le long terme…

Car bien souvent je suis à peu près au même endroit que l’autre avec ses reproches et ses critiques : moi aussi je projette des trucs, j’interprète, je me raconte des histoires. Moi aussi j’ai plein de croyances et de filtres qui font que je déforme les choses. Et si ce que dit l’autre m’affecte, si vraiment je le prends personnellement, c’est qu’il y a encore un bout qui me concerne dedans : c’est vraiment personnel.

Et oui, car si ça ne me concernait pas du tout, je ne réagirais pas…

Par exemple, quand un reproche est complètement à côté de la plaque, soit parce que je ne me sens pas du tout concernée, soit parce que je suis bien concernée mais tout à fait en paix avec mes faits et gestes, alors ça ne me fait vraiment rien de désagréable. Dans ce cas, je vois clairement que l’autre parle de lui.

Éventuellement ça crée en moi de la tendresse ou de la curiosité pour ce que vit l’autre, parfois de la tristesse si jamais j’aspire à vivre autre chose dans la relation. Mais pas de colère ni de réaction défensive ici…

Ma conclusion c’est que tant que je reçois pas le reproche en ressentant de la tendresse, de la curiosité ou de la compassion, c’est qu’il reste encore un bout chez moi. En d’autres termes : si je le prends personnellement, c’est que c’est personnel, au moins un petit peu.

Du coup je trouve ça dangereux de pratiquer l’accord numéro 2 de manière prématurée, il y a un risque de se couper d’une réaction. Et moi je me souviens que derrière chacune de mes réactions, il y a quelque chose qui demande mon attention.

Idéalement, oui, j’aimerais ne pas réagir. Mais si je réagis, j’aime autant être honnête et regarder ça en face, plutôt que prétendre que cela ne m’affecte pas (au nom du 2ème accord). Autrement dit, ici j’ai besoin d’humilité et d’honnêteté pour reconnaitre que oui, ça m’affecte et oui j’ai du boulot et oui j’ai une réaction défensive ici…

Quelques outils concrets pour moins prendre les choses personnellement

Alors c’est quand même utile de pratiquer cet accord, car personnellement ça me donne de la clarté sur : qu’est-ce qui concerne l’autre / qu’est-ce qui me concerne moi. J’ai quatre ressources qui permettent de faire ça.

Ressource 1 : observer au lieu d’interpréter

L’observation c’est la tentative d’être le plus neutre possible, de décrire uniquement les faits. Étant donné le fonctionnement de notre système perceptif, il est sans doute impossible d’accéder à une forme de vérité parfaitement objective.

Il est néanmoins possible d’être le plus objectif possible, de faire de notre mieux pour séparer les interprétations des observations. Pour certaines personnes il est très facile de faire la différence, et pour d’autres c’est beaucoup plus dur. Pour ces gens là, une question peut aider, c’est « puis-je être absolument certaine que c’est vrai, n’y a-t-il pas d’autre interprétation possible ? ».

Si vous êtes adepte du « Travail » de Byron Katie, vous reconnaitrez sa première question « est-ce que c’est vrai ? ». Le Travail est un super outil avec les pensées et les interprétations…

Exemple

Par exemple, si j’attends des nouvelles de quelqu’un et que je n’en ai pas, voici un certain nombre d’interprétations :

  • la personne est débordée et n’a pas le temps de m’écrire
  • elle s’en fiche de moi et n’a pas pris le temps d’écrire
  • elle ne m’a pas écrit

Toutes ces phrases sont des interprétations, même la dernière, car je ne suis pas sure que le courrier (email, message ou autre) n’a pas été envoyé et perdu d’une façon ou d’une autre. La seule observation que je peux faire c’est : je n’ai rien reçu. Je ne peux pas dire grand chose d’autre…

Et personnellement ça me fait déjà une bonne grosse différence de ressenti quand je me dis « je n’ai rien reçu » par rapport à « la personne est trop débordée pour m’écrire »…

Intérêt de séparer observation et interprétation

Vous voyez donc l’intérêt d’observer sans y mélanger nos interprétations : ça fait déjà moins mal, c’est déjà moins personnel. Les interprétations contiennent un peu de l’histoire que je me raconte (sur moi : je ne compte pas, je suis invisible… ; sur l’autre : il·elle s’en fout de moi, est égoîste…), elles ajoutent une couche de souffrance à l’observation.

Et le double effet kiss-cool, c’est qu’une fois que j’ai séparé observation et interprétation, je peux mettre sur mon étagère « à travailler plus tard » mes interprétations : elles contiennent des choses que je me raconte, des croyances. Ce sont de précieux signaux à aller écouter, notamment s’il y a des choses récurrentes dans mes interprétations.

Ressource 2 : aller vérifier mes interprétations

Personnellement quand je démêle mes observations des interprétations, bien souvent je me retrouve avec très très peu d’informations précises, objectives et vérifiées. L’essentiel de mon discours interne est un gros paquet d’interprétations, et une fois que je les ai mises de côté il ne me reste plus grand chose.

A ce stade, si / quand je peux, je vais compléter mes observations, en allant vérifier auprès de la personne concernée. Je peux soit demander ce qu’il s’est passé, soit carrément offrir mes interprétations et demander si ça sonne juste pour l’autre.

Dans mon expérience c’est un super cadeau pour la relation de faire ça, car ça permet de poser les choses, de quitter la mythologie intérieure pour revenir à la réalité. Ça permet aussi de mieux se comprendre et d’être en lien plus en profondeur. Et souvent ça apaise les éventuelles tempêtes émotionnelles causées par les interprétations…

Ressource 3 : choisir l’interprétation la plus respectueuse

J’ai déjà parlé de ça dans un billet précédent (la présomption d’innocence), il s’agit de lister les interprétations qui font honneur à l’autre, qui mettent en évidence que la personne fait de son mieux, qu’elle est simplement en train de nourrir ses besoins, que son intention est bienveillante. Et ensuite dans toutes ces interprétations je choisis la plus belle et la plus respectueuse.

Au pire je me trompe (sans aller vérifier je ne saurai pas), mais dans tous les cas je restaure la dignité de l’autre dans mes pensées et j’ai beaucoup plus de chances de ne pas faire une affaire personnelle de la situation.

Ressource 4 : identifier quel besoin la personne tente de nourrir en faisant ça

C’est encore quelque chose qui me permet de ne pas tout prendre contre moi : me souvenir que l’autre a des besoins qu’il ou elle tente de nourrir d’instant en instant. Comme dit Marshall Rosenberg le père de la Communication NonViolente : toute action nourrit un besoin.

Quand l’autre dit ou fait un truc qui me fait réagir, je peux donc me demander quel est son besoin en cet instant, que se passe-t-il pour cette personne. Qu’est-elle en train de me demander, à travers cette action ou parole ?

Personnellement, quand j’arrive à trouver un besoin (même si je me trompe), il y a quelque chose qui se calme un peu chez moi, car j’arrive alors à voir que ça n’a pas grand chose à voir avec moi mais plutôt avec son besoin.

Le travail en profondeur : aller voir ce qui me concerne

Les outils et ressources précédents permettent bien souvent de se démêler, de voir plus clairement ce qui appartient à l’autre et de lui rendre la responsabilité de ses besoins et de ses histoires. Ainsi, je coupe le lien de causalité avec ce que moi je viens de faire ou dire.

Une fois que ce travail est fait souvent c’est chouette, on est moins touché·e par ce qui est dit. On voit plus clairement ce qui est en jeu chez l’autre. On est parfois même attendri·e ou plein·e de compassion pour l’autre.

Cet apaisement permet de revenir tranquillement, à notre rythme, sur ce qui est de notre responsabilité, sur le contenu de notre étagère. Parce que je le redis : si je suis activée par ce que dit l’autre c’est qu’il reste des choses à aller écouter chez moi.

Mon expérience en la matière est que c’est extrêmement varié et qu’il n’y a pas vraiment de recette magique. Ici je vais juste décrire deux grosses catégories, qui m’aident bien, mais il y en a d’autres…

Amour de soi, être en paix avec soi-même

Ça c’est pour les zones où je suis sur la défensive : quand je me défends face à un reproche ou une critique, c’est parfois qu’il y a une part de moi qui croit à ce reproche et qui est d’accord avec. Autrement dit, il y a quelque chose en moi qui ne m’aime pas, qui juge ce que je fais, etc.

Aller écouter cette zone critique et pas contente en moi c’est hyper précieux :

  • d’abord ça fait que je reprends ma responsabilité… Bah oui, ce n’est plus l’autre qui me critique, mais bien moi qui me critique. Reprise de responsabilité signifie aussi reprise de pouvoir, je ne suis plus victime de la critique de l’autre, je peux faire quelque chose (m’écouter par exemple, ou agir).
  • ensuite, si j’écoute pour écouter (sans autre projet, sans vouloir calmer ou changer mes jugements), avec curiosité et détente, je vais entendre des trucs chouettes, des besoins et des aspirations. Peut-être que la part qui me critique a besoin d’être rejointe dans ce qu’elle vit, que je mesure combien c’est dur pour elle, etc. Souvent d’offrir cette écoute intérieure en étant simplement présent·e à soi-même ça apaise quelque chose.
  • outre l’apaisement, il peut arriver que mettre de la clarté sur les besoins en jeu ça me donne envie d’agir, de changer quelque chose dans mon comportement. Et ça, ça peut avoir un impact positif sur la relation…

Une fois que c’est détendu à l’intérieur, j’ai beaucoup plus de chances d’être en paix avec qui je suis, d’avoir de la douceur envers moi-même. Depuis cet espace, je suis plus tranquille face aux reproches et aux critiques. Car au lieu de me défendre je peux simplement prendre honnêtement la responsabilité de mes actes.

Personnellement, plus je suis en paix avec mes limites, avec mes difficultés, avec mon manque de moyens par moments, moins je réagis face aux critiques. Ma paix intérieure est une vraie ancre.

Décoller les étiquettes et récupérer des qualités perdues

Certaines critiques font mal parce qu’elles répètent des choses que j’ai entendues étant enfant. Par exemple, des étiquettes posées sur moi « tu es égoïste » ou « tu es maladroite » ou autre. Elles peuvent être associées à des croyances héritées du clan familial « il faut être généreux pour être une bonne personne », « ces choses là ne se font pas », etc.

Là aussi, il y a un double travail à faire :

  • à la fois écouter la croyance, se relier à l’intention derrière cette croyance. Après tout, c’est plutôt une bonne idée de vouloir que ses enfants soient « de bonnes personnes ». Honorer les aspirations et les valeurs du clan.
  • et à la fois réintégrer les aspects de moi qui ont été cachés, reniés ou évincés quand j’ai décidé d’être loyale envers mon clan en embrassant la croyance.

Quand on est enfant il est naturel de choisir l’appartenance au clan à tout prix, même si ça implique de renier des parts de soi. Devenu·e adulte, on peut voir ça et vivre à la fois la loyauté au clan et être pleinement soi-même.

Et, oui, ça veut dire accepter que par moments je suis égoïste, maladroite, flemmarde ou autre. Et ça ne fait pas de moi une mauvaise personne, je peux m’aimer avec ça. Et le meilleur dans tout ça, c’est que ces parts reniés, celles qui étaient mal vues ou inacceptables, bien souvent contiennent des ressources inestimables.

Par exemple, être capable d’égoïsme par moments, ça permet de ne pas oublier de prendre soin de soi. Ça permet d’être capable de mettre des limites à ce qu’on donne (et d’éviter le burn-out). M’autoriser à être maladroite ça me permet d’avoir de la conscience de ma fatigue, de repérer les moments où ça va trop vite pour moi. Ça permet de respecter mon rythme d’apprentissage, là aussi de mettre des limites.

Et tout le reste

Voilà donc quelques exemples de ce que l’on peut trouver derrière une réaction défensive, une forte sensibilité à une critique. Chaque cas étant différent, le plus simple est de commencer par repérer les pensées qui sont les plus douloureuses. Ensuite, on peut prendre ensuite le temps d’aller écouter la source de ces pensées. Qui parle (une part de moi, un de mes ascendants ou proches), quel est le vécu de ce qui parle, qu’est-ce que je peux mesurer honorer écouter puis libérer. In fine, ce que l’on vise c’est d’être en paix et en amour avec soi, tel·le que l’on est. Ainsi ancré·e, on est tranquille face aux critiques reproches ou autres trucs qui chatouillent…

J’en reste ici pour aujourd’hui (il y aurait des milliards de trucs à dire), j’en garde pour plus tard. N’hésitez pas à poster vos commentaires, questions ou réactions ci-dessous !


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2 commentaires

  1. Très bon article. En particulier, la section qui traite de la résonnance entre une critique entendue et une auto-critique potentielle qui existerait en moi me semble être une bonne piste de réflexion.

    • Merci 🙂 oui moi aussi j’aime bien cette résonance aussi, j’y trouve des trésors de trucs internalisés, c’est souvent une belle découverte !

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