Comment devenir proactif

En 2013 j’ai découvert cette notion de proactivité, au travers de la lecture de Stephen R. Covey. Avant même la découverte du processus de la Communication Nonviolente, ça a été pour moi une étape indispensable de développement personnel, un des tout premiers jalons sur mon chemin. Je vais commencer par tenter d’expliquer ce qu’est la proactivité, donner quelques exemples, et enfin finir par des pistes pour encourager sa propre proactivité.

[Cet article est une version mise à jour de mon premier article sur le sujet]

Quoi qu’est-ce donc ?

Alors d’abord, de quoi s’agit-il ? D’après wikipédia, « le terme proactif […] décrit une personne qui prend en main la responsabilité de sa vie, plutôt que de rechercher des causes dans les circonstances ou les personnes extérieures. » A l’opposé, on appellera « réactive » la personne qui cherche les causes dans les autres et le monde extérieur.

Remarquez ici que j’utilise deux mots différents : « responsabilité » et « causes » et il me semble important de ne pas les confondre. En effet, quand je prends la responsabilité de ma vie, je ne dis pas que je suis la cause de tout ce qui m’arrive. Il ne s’agit pas ici de chercher un fautif ou une cause, mais plutôt de dire « ok, ça m’arrive à moi, et maintenant qu’est-ce que j’en fais ? ».

Autrement dit, la cause m’intéresse peu, je ne vais pas passer mon énergie à chercher la cause ou la faute (extérieure ou intérieure), je vais plutôt mettre mon énergie à prendre la responsabilité de ma réaction face à ce qui m’arrive et la responsabilité des choix que je pose pour y faire face.

Exemple avec la météo

Prenons un premier exemple simple, je vais au mariage d’un ami, et le temps est exécrable. Si mon ami a ce jour-là un comportement réactif, il n’aura de cesse de critiquer la météo, les saisons qui ne sont plus ce qu’elles étaient et le changement climatique, disant que le plus beau jour de sa vie est gâché par les éléments extérieurs, que c’est vraiment dommage, qu’ils avaient tout prévu dehors, et que le lieu est vraiment superbe quand il fait beau, et décevant sous la pluie, etc.

Tout dans son attitude montre qu’il prend la météo comme une attaque personnelle, comme un problème qui le concerne. Et il perd beaucoup d’énergie à râler contre un truc qu’il ne maîtrise absolument pas. De plus, critiquer la nature ou les météorologues ne changera vraisemblablement pas grand chose au temps, donc l’énergie me semble ici perdue pour rien.

A l’opposé, une personne faisant preuve ce jour-là de proactivité n’aura pas du tout la même attitude. Eventuellement, cette personne aura envisagé le mauvais temps et aura prévu des solutions de repli ou bien accepté le risque. Mais surtout, la personne proactive saura se dire les choses suivantes : je ne maîtrise pas la météo, je n’ai pas à me faire de souci pour quelque chose qui est hors de ma portée ; je choisis plutôt de mettre mon énergie au service de trouver une solution adaptée, car pour moi l’essentiel est que je réunisse pour mon mariage des gens que j’aime et que nous passions un bon moment ensemble, quelle que soit la météo.

Exemple avec le travail

Prenons maintenant un deuxième exemple : disons que j’ai un travail peu satisfaisant. Si je suis réactive face à cela, je vais m’enfermer dans une routine de râleries et de critiques permanentes, envers moi et/ou envers les autres :

  • vers les autres : mon chef est un incapable, mes qualités sont sous-évaluées, je suis incomprise, on ne m’écoute jamais, le boulot n’est pas intéressant, tel collègue est mieux vu que moi et on lui donne de meilleures choses à faire, mon salaire est minable, etc.
  • vers moi : de toute façon je ne mérite pas mieux, je fais du boulot de merde c’est bien normal que j’en sois là, j’aurais dû plus travailler à l’école au lieu de m’amuser, etc.

Je peux rester ainsi de nombreuses années, à perdre beaucoup d’énergie en pensées répétitives, à ressasser éternellement les mêmes rengaines, pour devenir de plus en plus aigri, sans que quoi que ce soit change pour le mieux dans ma vie.

Si au contraire je suis proactive face à cette difficulté, je vais prendre ma responsabilité et l’utiliser pour sortir de l’attitude réactive. Je vais ainsi prendre pleinement conscience que j’ai le choix de partir ou de rester et de poser des actions. Oui, j’ai le choix, même si l’alternative est tellement pourrie que je peine à l’envisager, j’ai toujours le choix. Je pourrais par exemple aller rencontrer mon chef et aménager mon poste, proposer de prendre d’autres rôles ou responsabilités. Je pourrais collaborer plus activement avec mes collègues, et en faire des allié.es plutôt que des adversaires.

Si l’environnement de travail est vraiment tel qu’il m’est difficile de changer quoi que ce soit, il y a au moins deux choses faisables pour l’individu proactif (et beaucoup plus que deux sans doute, si vous utilisez toute votre créativité).

La première, c’est changer de travail. Ce n’est pas un changement facile évidemment, cela demande beaucoup de courage pour affronter l’incertitude et la remise en question nécessaire au changement. Mais cela a le mérite de résoudre le problème : si mon travail est inacceptable, alors je n’ai pas à l’accepter et je peux faire le choix de changer, si je m’en donne les moyens.

La deuxième chose, c’est que je peux aussi décider de ne pas changer de job, mais dans ce cas je décide vraiment et pleinement de rester, en conscientisant mon choix. Autrement dit, pour ne pas subir la situation il va m’être utile de comprendre que j’ai vraiment fait un choix, par exemple en clarifiant les raisons pour lesquelles je reste et j’accepte les conditions de travail. Ce sera par exemple : ce travail est nul, mais il paie bien, et mieux que tout ce que je pourrais espérer ailleurs, je choisis donc de rester pour l’argent. Ou alors : ce travail est nul, et en même temps il est proche de chez moi et/ou il offre des services annexes excellents (mutuelle, avantages en nature) et/ou les horaires me conviennent parfaitement.

Dans tous les cas, j’ai retrouvé une raison personnelle qui fait que je continue à ma place et que j’accepte les conditions de travail. J’ai retrouvé un choix et donc mon pouvoir. J’assume donc les aspects qui me gênent parce que je sais qu’ils sont contrebalancés par un aspect qui est important et précieux pour moi, et je peux tranquillement arrêter de râler et me détendre.

Si je veux employer des mots qui me viennent du contexte de la Communication Nonviolente, je pourrais dire qu’ici j’écoute les diverses parts de moi, je prends le temps de les empather, de les traduire et de me relier à leurs besoins, si besoin j’orchestre entre elle une médiation je fais ensuite un choix conscient et je pose une action ajustée, et je prends le temps de faire les deuils et renoncements que ce choix implique.

Ok, on résume

On peut maintenant reformuler un peu les deux attitudes réactive/proactive.

Etre réactif c’est être dans la réaction, être sur la défensive, par rapport à des choses que l’on ne maîtrise pas et sur lesquels on n’a aucun contrôle. C’est avoir perdu (de vue) sa responsabilité, son pouvoir et sa liberté de choix. C’est subir et non plus agir ou choisir. C’est utiliser couramment des expressions « il faut », « je dois », « je n’ai pas le choix », etc.

Etre proactif c’est prendre le contrôle de sa vie, changer les choses que l’on peut changer, ne pas se faire de souci pour les choses que l’on ne contrôle pas, et changer de point de vue sur sa vie, retrouver son pouvoir et la liberté de faire ses choix. C’est utiliser des expressions « je choisis », « j’ai décidé », « je préfère », et savoir dire « non ».

Bon évidemment ce ne sont que des étiquettes un peu globales, en pratique je vais être proactive dans certains domaines et à certains instants, réactive à d’autres, etc.

Et en pratique je fais comment ?

Bon maintenant qu’on a les idées plus claires sur les définitions, on peut maintenant se demander en pratique comment faire pour transformer l’attitude réactive en embrassant la proactivité. Comme j’aime bien les listes je vous en propose une, avec les différentes étapes de travail.

  • Faire la distinction entre ce que je contrôle et le reste. La première chose pour sortir de la réactivité, c’est de comprendre qu’il existe deux types de choses qui peuvent poser souci : des choses sur lesquelles je peux agir et d’autres sur lesquelles je ne peux pas. Par exemple, je ne contrôle pas la météo, ni l’action des politiciens, ni les catastrophes climatiques, ni les faits divers à la télé, je ne peux (en général) rien y faire, c’est hors de mon champ d’action (du mien en tout cas, pour vous c’est peut-être différent).
  • Si je ne peux rien y faire, je ne m’en soucie pas. Une fois que l’on sait distinguer ces deux types de choses, l’étape suivante est donc, si possible, d’arrêter de critiquer/râler/s’inquiéter sur tous ces sujets sur lesquels on ne peut rien. Si ça m’est difficile, je peux prendre un temps pour moi où je râle/je critique/je pleure consciemment, pour rester avec mon émotion comme le ferait un ami, la goûter dans mon corps, lui dire bonjour, traduire ses rêves et aspirations, en faire le deuil, avant de la lâcher. Parfois, je peux en arriver à une attitude un peu extrême qui consiste à ignorer volontairement ces choses-là. Par exemple, moi je ne regarde/n’écoute/ne lis plus les actualités (pas de télé, pas de radio, pas de journaux, et pas de nouvelles sur internet), je gagne ainsi pas mal de temps chaque jour. Mes collègues et mes ami.es me racontent de toute façon l’essentiel, mais je choisis de ne plus mettre de l’énergie dedans, mais plutôt dans d’autres domaines de ma vie où je suis plus active et où je vais pouvoir, à ma manière, contribuer au monde dans lequel je veux vivre.
  • Si je peux faire quelque chose, j’agis. En parallèle, je vais agir sur les choses que je peux contrôler. Par exemple je ne critique pas la météo, mais j’emporte mon parapluie. Au lieu de me morfondre sur l’état de la planète, la dégradation de l’environnement et l’attitude faible des politiciens à ce sujet, je peux choisir d’agir à mon échelle, en mangeant bio, en achetant local et/ou équitable, en faisant mes courses à pieds ou à vélo, en économisant l’eau chez moi, ou dix mille autres petites idées écolo. Au lieu de critiquer les fonctionnaires qui ont un boulot de rêve je peux décider d’en devenir un moi-même, ou je peux savourer les avantages du privé. Au lieu d’être jalouse de mon voisin qui part en vacances dans un pays paradisiaque, je peux faire le choix moi aussi de supprimer quelques dépenses pour épargner et en faire autant, ou assumer mes choix de ne pas partir en vacances mais faire autre chose à la place. On voit au passage ici que la proactivité ce n’est pas forcément toujours l’action, mais parfois un simple changement d’attitude et de point de vue face aux choses et aux autres.
    J’aime bien cette phrase (attribuée à Lao Tseu ?) qui dit « mieux vaut allumer une bougie que maudire les ténèbres », elle résume en quelques mots l’essence de la proactivité je trouve.
  • Déjouer l’excusite. Devenir proactif suppose aussi de repérer « l’excusite », autrement dit « la maladie des excuses » (cf par exemple le livre « La magie de voir grand » par David J. Schwartz). Cette maladie est le frein principal à la proactivité, vous allez tout de suite voir pourquoi. Imaginons que je vois mon amie qui est très en forme et qui fait beaucoup de sport, et que sur ce sujet je ne suis pas encore proactive. Quand je discute avec elle, j’exprime de la jalousie, j’aimerais être pareille. Mon amie me dit qu’évidemment il ne tient qu’à moi d’être autant en forme qu’elle. Si je suis atteint d’excusite, je vais dire : « oui mais pour moi ce n’est pas pareil, je ne peux pas à cause de ma santé, de mon âge, je n’ai pas le temps, les enfants me pompent toute mon énergie, je me déplace beaucoup à cause du travail, etc. » Chacune de ces excuses est un leurre qui dissimule un choix plutôt qu’une impuissance. En gros je suis en train de lui dire « je ne peux pas, je n’ai pas le choix, ce n’est pas de ma faute ». Et ça c’est du bullshit, car à de très rares exceptions près on peut toujours faire le choix de changer, le monde fourmille de gens plein de limites et de contraintes qui réalisent malgré tout des exploits. Bon parfois ça demande de faire preuve d’inventivité, voire de renoncer à certains trucs précieux pour moi. Evidemment, il sera sans doute plus difficile pour moi de faire du sport, mais je peux trouver des solutions originales. Ou alors, je peux modifier mon discours, admettre que je choisis de ne pas faire de sport, simplement parce que j’ai d’autres priorités qui sont plus importantes pour moi et que je choisis de les honorer elles plutôt que le sport, ça rejoint le point ci-dessous :
  • Assumer et reconnaître mes choix. Et si mes « excuses » sont chères et valables à mes yeux, il sera plus doux pour moi de comprendre que ces excuses sont l’expression d’un choix. Par exemple, disons que je ne vais pas à la chorale le soir car je m’occupe de ma mère qui est âgée. Si je suis réactive, je vais dire « je ne peux pas, car je dois faire ça, je n’ai pas le choix ». Si je suis proactive je vais dire « j’ai choisi de mettre dans ma vie en ce moment la priorité à ma mère âgée, c’est important et nourrissant pour moi, j’assume ce choix, il me rend heureux, et du coup je mets un peu ma vie sociale en sourdine ». Ou encore, disons que je ne change pas de travail car j’ai peur de ne pas en retrouver derrière. Si je suis réactive, je vais dire « je ne peux pas changer, c’est trop dur à mon âge de retrouver du boulot, que se passera-t-il pour mes enfants si je n’en retrouve pas, je ne peux pas prendre ce risque, je n’ai pas le choix, etc. ». Si je suis proactive, je vais dire « je choisis de rester dans ce travail car il a le mérite de payer les factures et de me permettre de faire vivre mes enfants, ce n’est pas l’idéal, mais c’est pour moi la certitude d’un salaire, et cette certitude est plus importante que le déplaisir du travail, je choisis donc de rester et d’assumer les conditions difficiles ». Evidemment, faire un choix ce n’est pas toujours simple, et ça implique de savoir faire le deuil de ce à quoi l’on renonce.
  • S’entraîner. Comme toutes les nouvelles habitudes à prendre, comme une nouvelle compétence que l’on cherche à acquérir, cela demande du travail, ce n’est pas facile. On n’apprend pas le karaté, le violoncelle ou les maths en lisant un simple article de blog, c’est pareil pour la proactivité. Je vais donc m’entrainer à devenir moins réactive, m’exercer à classifier mes attitudes en réactives / proactives, essayer de changer d’attitude, progresser. Et ce n’est pas facile, évidemment je vais me planter mille fois. Et en même temps, c’est justement le plantage et la persévérance qui font le chemin et la progression, alors je vais tenter de ne pas me taper dessus quand je rate, mais plutôt de m’accueillir avec douceur, comme on accueille un enfant qui apprend à marcher et chute, et je recommence. La prise de conscience et l’entrainement finissent par porter leurs fruits…

Je me suis surtout concentrée dans cet article sur la proactivité vis à vis des éléments extérieurs (circonstances, évènements, environnement), et pas sur celle que l’on peut adopter avec autrui, mais c’est évidemment transposable.

Quand j’ai un souci avec quelqu’un, il y a (au moins…) deux attitudes : la première consiste à critiquer, à reprocher, à demander à l’autre de changer. La deuxième consiste à accepter que l’on ne peut pas changer autrui, mais qu’on peut se changer soi-même, et à mettre ceci en pratique. Par exemple, au lieu de dire que mon ami ne m’appelle jamais et que je n’ai pas de nouvelles, je peux accepter que mon ami fonctionne ainsi, et je peux l’appeler quand moi je veux des nouvelles. Ou alors je peux aussi décider que la relation n’est plus nourrissante pour moi et j’y mets un terme.

C’est toujours la même idée : j’accepte qu’il y a des attitudes je ne peux pas changer, et j’agis sur ce qui est à ma portée, je reprends mon pouvoir et la liberté de faire mes choix.

Pour moi la proactivité c’est le double effet kiss-cool : d’abord mon changement d’attitude me fait quitter l’aigreur, la rancoeur, le défaitisme et la résignation et je vis plus de confort et de détente. Ensuite, je prends conscience qu’il y a beaucoup de choses que je peux changer, et j’améliore encore mon confort de vie en faisant ces changements.

Ça vous inspire ? Laissez en commentaire le premier petit pas possible que vous aimeriez mettre en place après cette lecture !

Envie de travailler avec moi ? Direction la page « Accompagnement » pour plus d’info !

Vous voulez encore plus de super contenu ? Inscrivez-vous à la newsletter pour recevoir des nouvelles, de l’inspiration, des citations…

Partagez les bonnes vibes :

6 commentaires

  1. Intéressant de relire cet article complété avec les apports de la CNV. Quand à la persévérance nécessaire pour s’entraîner et devenir plus proactif, j’aime bien une citation de S. Beckett : « Essayer encore. Rater encore. Rater mieux. »

  2. Ping :Petit à petit, la Communication NonViolente embellit ma vie… – Le ptit chat courageux

  3. Ping :Est-ce que je confonds la flemme et la détente? – Le ptit chat courageux

  4. Ping :Je procrastine, et c’est bon pour moi – Le ptit chat courageux

  5. Ping :La présomption d'innocence, ou comment soigner ses interprétations - maëlle nodet

Répondre à elleam Annuler

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.