De l’importance des célébrations, gratitudes, deuils…

En Communication Nonviolente on apprend à faire, à donner, à recevoir et à goûter ce que l’on appelle des « célébrations ». Une célébration, c’est simplement revenir avec des mots sur un évènement, une relation, un moment, quoi que ce soit, et célébrer les besoins nourris ou pas et les émotions que cela génère en moi maintenant.

La célébration concerne aussi bien des choses qui génèrent des émotions agréables et confortables que celles qui génèrent des émotions inconfortables. Dans le premier cas je dirai que j’exprime une gratitude, que je célèbre les besoins nourris. Dans le deuxième cas je dirai que je fais le deuil de besoins en creux ou en plainte, de ce que je n’ai pas réussi à vivre.

Les célébrations sont pour moi une clef extraordinaire à beaucoup d’égards :

  • pour la gratitude, parler en terme de besoins nourris est vachement plus fort et goûteux pour moi que de dire « c’était super » ou « merci t’es trop fort.e! », car ça me donne plus d’information et ça m’aide à être en lien ;
  • célébrer des gratitudes et des besoins nourris, ça permet de ressentir ici et maintenant le précieux de ce qui a été vécu, une sorte de deuxième effet kiss-cool qui engramme en moi la plénitude des besoins ;
  • pour les deuils, accueillir la tristesse ou la déception de n’avoir pas réussi à vivre mon rêve est vachement plus soutenant que de me taper dessus, de critiquer des trucs, ou de me dire que « c’est pas grave » ;
  • célébrer les deuils me permet ici et maintenant de faire une place aux besoins en plainte, d’entendre les parts qui grincent, de m’empather pleinement, ce qui en général produit une détente qui me permet d’être en paix et de voir émerger des ressources nouvelles.

Quelques exemples de petites célébrations ordinaires

Je donne ici quelques exemples d’alternatives à quelques phrases qui font mon quotidien.

  • Merci pour le café pourrait se dire :
    J’adore que l’on prenne soin de moi, alors quand je vois que tu me fais un petit café quand je me lève, et bien c’est tout doux en moi, je me sens joyeuse et pleine de chaleur dans le coeur, et je me sens aimée et tendressée, merci mon ange !
  • Ah bordel j’ai encore rien foutu aujourd’hui pourrait donner :
    Ah, j’aurais vraiment aimé pouvoir faire plus de choses de ma liste aujourd’hui, du coup je suis déçue de ne pas avoir fini. En fait je crois que je suis un peu découragée car il me reste tout cela à faire et j’ai l’impression de manquer de temps et d’énergie. (+ petit soupir et temps de pause pour accueillir la déception et le découragement, leur laisser un peu d’espace… et ensuite je peux éventuellement faire une demande, par exemple d’empathie, de soutien, de changement d’organisation, etc. à moi ou à autrui)
  • C’est cool d’avoir pu discuter hier :
    Tu sais j’aime vraiment les échanges dans la profondeur, pouvoir partager, offrir ma vulnérabilité et recevoir la tienne, alors quand je repense à cette conversation que nous avons eue hier je me sens vraiment comblée, heureuse et pleine de gratitude, parce que c’est vraiment ça que j’aime vivre avec toi, cette authenticité et cette profondeur partagée.
  • C’est vraiment trop minable la façon dont j’ai parlé à ma voisine l’autre jour :
    J’aime vraiment vivre l’harmonie dans les relations, et savourer la bienveillance que j’offre et que je reçois, oui j’aime vraiment ça je crois, c’est important pour moi. Du coup, je me sens un peu dépitée, déçue, et triste dans le fond, quand je me souviens de ce que j’ai dit à la voisine l’autre jour. J’aurais tellement aimé avoir les moyens de vivre mon rêve d’harmonie et de bienveillance. Je me sens agacée aussi, enfin merde c’est vrai, depuis le temps que je pratique la CNV j’aimerais pouvoir faire différemment, et là je vois bien que je n’y arrive pas, que dans ces circonstances je suis à ma limite et je ne sais pas vivre mon rêve de douceur et d’harmonie et ça me rend triste. (+ là aussi, un temps pour respirer, laisser tout ceci se vivre et se déployer pleinement)

La petite expérience que je vous propose ici c’est de comparer comment ça fait en vous (dans votre corps, dans votre coeur) quand vous entendez les différentes formulations. Evidemment il n’y a pas de réponse juste ou fausse : le jour où j’ai besoin de calme et de repos ça va peut-être me gonfler d’écouter un long discours ; le jour où j’ai besoin de douceur et de connexion je vais préférer le long discours ; le jour où j’ai besoin de feedback je vais aussi préférer avoir de l’information sur les besoins nourris ou pas chez moi ou l’autre, et ça c’est tout personnel évidemment…

Quelques bienfaits, en vrac

Ralentir

Exprimer une gratitude, faire un deuil, cela demande un temps de pause et de pose. Cela demande une clarification intérieure, un peu d’énergie à mettre pour chercher les besoins. Moi ça m’aide à moins bâcler mon existence, à moins enchaîner les évènements et les rencontres, ça m’aide à me poser et à profiter pleinement de l’instant. Ce temps de pause il me permet de ne pas vivre ma vie comme si j’étais une suite de dépêches de l’AFP, où chaque nouvelle écrase la précédente et où tout disparaît en quelques minutes. Prendre le temps de célébrer c’est pour moi profiter de la lenteur pour gagner en profondeur.

Accueillir

Evidemment, pour chacun des deuils que je fais, j’ai des parts qui sont capables de relativiser, de me faire gagner en perspective, de me faire changer de point de vue, pour que finalement ce qui m’arrive ne soit « pas grave ». Et en même temps, si je laisse ces parts « réparatrices, guérisseuses » s’exprimer trop tôt, elles coupent l’herbe sous le pied des parts qui souffrent. Et ces parts qui souffrent ne sont pas des monstres affreux qui menacent l’équilibre de mon système et doivent être muselées à tout prix. Ces parts qui souffrent ont simplement besoin d’être accueillies pour ce qu’elles sont, avec la même curiosité ouverte, la même douceur bienveillante que les autres.

Jeff Foster le dit d’une manière qui me parle particulièrement : « held, not healed » mes parts n’ont pas besoin d’être guéries, elles ont juste besoin d’un câlin. Et c’est justement ce câlin sans autre intention que les accueillir telles quelles, sans vouloir les changer, sans vouloir que les émotions cessent, qui produit justement l’apaisement, l’accès aux ressources intérieures, et effectivement une forme de guérison. Mais c’est une conséquence (parfois) du câlin, ce n’est pas le but, et c’est ça qui fait toute la différence…

Vivre mieux

Et tout ça c’est pas juste moi qui le dis : on ne compte plus les articles de recherche qui montrent que la gratitude est très bénéfique pour la santé physique, émotionnelle et psychique, tout comme les livres et articles de blog qui en vantent les mérites et donnent des billes pour pratiquer la gratitude au quotidien (voir plus bas).

Pratiquer

Quelques propositions pour pratiquer les célébrations au quotidien :

  • Avoir un cahier de gratitudes à côté de son lit, et en écrire quelques unes chaque soir.
  • Si possible, retenir un peu la part de moi qui dit « c’est pas grave » et laisser le temps à celle qui pleure, qui est déçue, qui râle, de vivre pleinement ce qu’elle traverse. Faire (par écrit ou à voix haute pour soi) pleinement le deuil de ce que j’aurais aimé vivre.
  • En famille et/ou en couple, régulièrement échanger des gratitudes, tout particulièrement pour les petites choses du quotidien (la vaisselle est faite, le thé est prêt, le repas aussi, le lit est fait, la lettre est postée, etc.), avec cette idée que rien n’est acquis, et tout est un merveilleux cadeau.
  • Au bureau ou en lien avec des tiers, célébrer les choses qui marchent bien (c’était vraiment rapide comme procédure, le train était à l’heure aujourd’hui, merci d’avoir pris le temps de faire ça pour moi, il était bon votre pain l’autre jour, merci pour la place, etc.), toujours avec cette idée que les bonnes choses qui m’arrivent, même anodines, même « normales » ou attendues, sont des cadeaux.

Voilou ! J’aurais de la joie à lire comment c’est pour vous tout ça, et pour celles et ceux qui veulent aller plus loin, vous trouverez quelques liens ci-dessous, ou un autre article par ici : la gratitude comme art de vivre.


Ressources

Quelques ressources générales sur la Communication Nonviolente

Gratitude et deuils en Communication Nonviolente :

Quelques infos sur Marshall Rosenberg et la CNV :

Ça vous inspire ? Laissez en commentaire le premier petit pas possible que vous aimeriez mettre en place après cette lecture !

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